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La Cour de cassation s'oppose à la réforme de la procédure pénale

Publié le par PcfBalaruc

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L’audience de rentrée de la Cour de cassation a été marquée hier par une manifestation de magistrats et d’avocats 

 

Réunis en assemblée générale, vendredi 16 avril, les magistrats de la Cour de cassation ont rendu un avis très négatif sur l'avant-projet de réforme de la procédure pénale que leur a soumis la garde des sceaux, Michèle Alliot-Marie. Ils estiment que ce projet, qui supprime le juge d'instruction et confie tous les pouvoirs d'enquête au parquet, "ne garantit pas suffisamment les équilibres institutionnels et l'exercice des droits de la défense et de la victime". Par Pascale Robert-Diard

"L'ouverture des droits de la personne mise en cause et de la victime ne doit en aucun cas résulter de l'appréciation en opportunité du procureur de la République", notent les magistrats du siège et du parquet. A propos des victimes, ils relèvent que "la constitution de partie civile étant un contrepoids à l'éventuelle inaction du procureur, la victime ne peut être privée du droit de provoquer l'enquête et la poursuite". Le fait de laisser à l'appréciation du procureur l'exercice de leurs droits par les parties porte atteinte aux principes des droits de la défense et d'égalité des armes, indique l'avis.
L'autre sujet de désaccord porte sur les pouvoirs octroyés à la police par le projet de réforme. Sur la garde à vue, les magistrats estiment que son contrôle ne peut dépendre du parquet. Ils s'opposent également au transfert de la notification des charges (aujourd'hui, la mise en examen) du juge d'instruction à un officier de police judiciaire.
Les magistrats de la Cour de cassation prennent enfin résolument leurs distances avec la réforme envisagée du régime de prescription en matière d'abus de biens sociaux. Ce sujet, qui constitue un chiffon rouge depuis plusieurs années – plusieurs tentatives de réforme ayant déjà échoué –, fait peser sur la chancellerie le soupçon de vouloir limiter les poursuites en matière politico-financière. De l'affaire Elf à l'Angolagate, plusieurs dirigeants d'entreprises et des hommes politiques ont été condamnés ou sont mis en examen pour des abus de confiance, des abus de biens sociaux ou des recels de ces chefs.
La particularité de ces affaires vient du fait qu'il s'agit de délits dissimulés, qui sont souvent portés à la connaissance de la justice tardivement. C'est pour cette raison que la Cour de cassation a imposé une jurisprudence qui fait courir la prescription à partir du moment où les faits ont été révélés et non quand ils ont été commis. Le projet de réforme remet en cause cette jurisprudence. Dans leur avis, les magistrats insistent sur le fait que cette modification "serait contraire aux impératifs de lutte contre la grande délinquance".
L'avis de la Cour de cassation s'ajoute à de très nombreuses critiques émanant du monde judiciaire à l'encontre de la réforme : l'Union syndicale des magistrats (USM, majoritaire), le Syndicat de la magistrature, FO-Magistrats et l'Association française des magistrats instructeurs ont quitté la concertation lancée le 2 mars par la ministre de la justice. "C'est un peu comme si on nous avait mis en cage, et qu'on ne nous laissait discuter que de la peinture qu'on va y mettre, dénonce Christophe Régnard, président de l'USM. J'espère que la chancellerie saura entendre les voix qui montent de toutes parts pour dire que le projet n'est pas bon."
 

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