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Pôle emploi : le ras-le-bol, même au sommet

Publié le par PcfBalaruc

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Auteur d’un rapport, mesuré, sur les dysfonctionnements liés à la fusion ANPE-Unedic, Benoît Genuini démissionne, avec fracas, de sa fonction de médiateur de Pôle emploi. Un geste symbolique d’un malaise profond, partagé d’un côté comme de l’autre des guichets de l’assurance-chômage.


C’est la pagaille à Pôle emploi, mais chut ! Dans le contexte de chômage galopant, la fusion à marche forcée entre l’ANPE et les Assedics montre chaque jour ses limites : condamnés sous peine de sanctions à prendre des emplois en voie de raréfaction ou, tout simplement, de précarisation, les chômeurs, contrôlés, ponctionnés en cas de «trop-perçu» ou radiés parfois mécaniquement, subissent de plein fouet les effets des «dysfonctionnements» liés à la création de Pôle emploi et de l’allongement des délais pour établir leurs dossiers ; et, au sein des agences fusionnées, les personnels, placés en concurrence avec les opérateurs privés de placement, sont, eux, incités à faire toujours plus de chiffre, quand le président de la République et le gouvernement avaient claironné leurs promesses fallacieuses de réduire le nombre de demandeurs d’emploi suivis par agent. De part et d’autre des guichets, livres-témoignages, grèves ou tentatives de suicide en témoignent, le malaise est patent face à cette «machine à broyer».

Témoin, ce qui vient d’arriver à Benoît Genuini, médiateur et membre de la direction de l’organisme fusionné : après avoir publié il y a un mois son rapport 2009, ce très proche de Martin Hirsch, ex-haut commissaire aux Solidarités actives dans le gouvernement Fillon, a claqué la porte hier de Pôle emploi. Et en recourant aux services d’une boîte de communication qui a largement diffusé l’information, il a choisi de le faire savoir largement… avant de se mettre aux abonnés absents ! «Je n’ai ni les moyens ni le soutien nécessaires pour continuer à faire mon travail, a-il expliqué au Figaro. La direction générale n’a pas vu l’intérêt de mon rapport parce qu’elle accepte mal toute forme de critique.» Dans ce document qui, très éloigné du brûlot syndical, se contente de relater une soixantaine d’histoires réelles de chômeurs et de préconiser «beaucoup plus de bon sens et d’humanité», l’ex-médiateur de Pôle emploi tentait notamment d’alerter sur «l’impact des radiations sur ceux qui en font l’objet» ou encore sur certains «excès» liés aux activités de recouvrement d’allocations «indues».


Impossible indépendance. Pour Laurent Guilloteau, membre de la coordination des intermittents et des précaires d’Île-de-France qui, ces derniers mois, a mené plusieurs actions collectives sur le terrain pour faire annuler des procédures de radiation ou de récupération de trop-perçu , «l’assurance-chômage est aujourd’hui une zone de non-droit et le phénomène est si massif qu’on ne voit pas bien ce qu’un médiateur pourrait y changer quand, pour un même chômeur, le système peut aller jusqu’à établir des notifications contradictoires, verser une allocation, puis la retirer sans jamais nous avertir et saisir tout, y compris la quotité insaisissable. »
Tant à la direction de Pôle emploi que dans les syndicats, cette démission spectaculaire a pris tout le monde de court. Pour le SNU Pôle emploi, Philippe Sabater considère que «  le médiateur a été poussé dehors : il n’y avait aucune indépendance possible parce qu’il était sous la tutelle directe de la direction  ». Délégué syndical central CGT, Stéphane Guillou ne se montre guère étonné par ce départ : « Il suffit que le médiateur ait un tout petit peu de conscience personnelle pour choisir la démission. Au fond, le médiateur comptait parmi les 80 % de salariés qui, selon l’enquête sur les risques psychosociaux à Pôle emploi, considèrent que, dans leur travail, on leur demande de faire des choses auxquelles ils n’adhèrent pas. »

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