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Embrasement politico-social en Nouvelle-Calédonie

Publié le par Pcf Balaruc



La Nouvelle-Calédonie c'est loin de la France, et puis c'est l'été, le chef de l'Etat se repose au cap Nègre, alors pensez..., la télévision a d'autres contes à proposer que de s'embarrasser d'un conflit qui dure depuis une bonne semaine et bloque l'ïle, un peu comme en 1980. Vous vous souvenez ? Mais que se  passe t-il à Nouméa où des affrontements violents ont eu lieu aujourd'hui entre des militants du syndicat USTKE* et les forces de l'ordre ?
Par Claudine Wéry (correspondant du Monde)
 
Mercredi 5 août, un pallier a été franchi, en Nouvelle-Calédonie, dans les heurts entre le syndicat USTKE (Union syndicale des travailleurs Kanaks et des exploités) et les forces de l'ordre. Les gendarmes dépêchés à la tribu de Saint-Louis, à la périphérie de Nouméa, pour dégager les barrages de pneus enflammés dressés par des jeunes et des adhérents de l'USTKE, ont essuyé des tirs. L'un d'entre eux a été touché à la cuisse par une charge de chevrotine. Le bilan de ces affrontements, en fin d'après-midi heure locale, faisait état de deux gendarmes et quatre manifestants blessés et de treize arrestations.
Depuis plus d'une semaine, un climat de tension règne en Nouvelle-Calédonie. En grève générale, pour protester contre l'enlisement d'un conflit à la Compagnie aérienne domestique Aircal, le syndicat USTKE organise chaque jour des barrages routiers et des blocages d'entreprises, levés par les forces de l'ordre à coups de grenades lacrymogènes, auxquelles répondent jets de pierres et de projectiles. Ces heurts font resurgir le spectre des violences qu'a connues cet archipel dans les années 1980, semant l'inquiétude dans la population.
Deuxième syndicat du territoire, l'USTKE est une organisation qui ne s'en laisse pas compter. Fin juin, son président Gérard Jodar a été condamné à un an de prison ferme, avec mandat de dépôt, pour "entrave à la circulation d'un aéronef", alors que les militants avaient envahi l'aérodrome de Magenta dans le cadre du conflit à Aircal. Son embastillement est apparu comme le point d'orgue d'une politique de "retour à l'autorité de l'Etat", lancée en 2007 après l'élection de Nicolas Sarkozy. "Un de mes premiers chantiers est d'améliorer le dialogue social (...) et si besoin est, de faire preuve de fermeté" avait, dès son arrivée en novembre 2007, prévenu le haut-commissaire de la République, Yves Dassonville.
Son prédécesseur Michel Mathieu, avait démissionné à l'issue d'une visite de l'ancien secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, christian Estrosi. Les deux hommes s'étaient vertement querellés, le ministre reprochant au haut-fonctionnaire son "laxisme et sa passivité" alors que l'USTKE émaillait sa visite de manifestations bruyantes. "On n'est plus du tout dans le syndicalisme, on est dans la pure violence, dans un comportement de voyous (...). Il n'est pas tolérable que l'on mette le feu à la Nouvelle-Calédonie", affirme aujourd'hui M. Dassonville. Soutenu par José Bové et par le NPA, 'USTKE, pour sa part, dénonce "la répression policière sans limite" de ses actions. A juste raison si l'on prend en compte cette déclaration du député UMP Pierre Frogier : "l'USTKE est aujourd'hui devenu un abcès qui gangrène l'ensemble des relations sociales. Un abcès, ça se traite. Il faut l'enlever avec un bistouri".
Ces tensions dépassent le cadre syndical. L'USTKE s'est doté il y a un an et demi d'une succursale politique : le Parti Travailliste. La nouvelle formation stigmatise "l'embourgeoisement et la mollesse" des dirigeants du FLNKS et se présente comme une alternative politique. Dirigé par Louis Kotra Uregei, ancien président-fondateur de l'USTKE, la Parti Travailliste dispose depuis mai 2009, de trois élus au Congrès territorial. Son discours radical trouve écho auprès de la jeunesse exclue du mode de production et qui n'a jamais pu profiter des retombées de la croissance économique exceptionnelle que la Nouvelle-Calédonie connaît depuis plusieurs années avec la construction de deux usines de traitement du Nickel. L'afflux d'une importante main-d'oeuvre extérieure pour ces chantier en est  la cause. Ce problème et les menaces sur l'environnement que fait peser l'industrialisation accélérée du territoire, ont fédéré les revendications. L'USTKE a trouvé des appuis auprès du mouvement autochtone Rheebu Nuu et d'élus de l'Union Calédonienne, qui veulent reprendre le leadership du FLNKS.
En face, la droite, majoritaire, soutient l'action de l'Etat et dénonce une destabilisation du territoire, qui l'a privée en mars de la présence du premier ministre, François Fillon, puis de celle de M. Sarkozy, qui devait présider le 31 juillet, le sommet France-Océanie. "Sarkozy considère que le terrain est miné et que dans ce contexte, il lui est impossible de venir en Nouvelle-calédonie", confie un dirigeant de la droite locale. L'Etat, garant avec les non-indépendantistes et le FLNKS, de l'accord de Nouméa ne cache pas son inquiétude face à la radicalisation de la contestation. D'autant, que la perpective d'un référendum d'autodétermination prévu entre 2014 et 2018, approche à grand pas.

*Historiquement proche de la Cgt, elle s'est rapprochée de la confédération paysanne et des milieux altermondialistes.
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