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Travail du dimanche : un choix de société

Publié le par Paule Masson

"Est-ce qu'il est normal que le dimanche, quand Mme Michelle Obama veut avec ses filles visiter les magasins parisiens, je doive passer un coup de téléphone pour les faire ouvrir ?". Réquisitionner la première dame des Etats-Unis pour défendre le travail du dimanche, il fallait oser. Mais le président de la République est prêt à tout pour imposer sa " promesse de campagne". Même à enrôler la famille Obama dans ce funeste dessein. Il n'y a là aucun hasard. Les Etats-Unis fonctionnent comme un modèle. A New York, la sortie du dimanche consiste à faire ses courses en famille. Là-bas, le jour de la fête nationale, le 4 juillet, les enseignes organisent des soldes spéciales. Dans le temple de la consommation, tout est ouvert, jusque tard dans la nuit. On dépense. On consomme. On fait du business. On travaille. Question de société.
Le travail dominical a cela de très politique qu'il oppose deux conceptions de la vie en société. Se préserver un temps pour vivre ensemble, pour se retrouver en famille, pour se cultiver, pour militer, faire du sport, bref préserver un "jour sans", ou s'adapter aux  diktats du marché, qui commandent d'être compétitif à tout moment, d'aller plus vite que l'autre, d'être toujours concurrent. Nicolas sarkozy a choisi son camp et dans son vaste chantier de dérégulation sociale, il fait la chasse aux temps morts, aux temps qui ne rapportent pas d'argent.
Le gouvernement valorise une société boulimique de consommation, un monde du temps court qui conditionne les êtres humains au temps court  de la rentabilité financière. Il faut travailler plus, plus longtemps, plus vieux, le dimanche, les jours fériés (la pentecôte, par exemple, devenu un jour de travail gratuit), et bientôt pendant son arrêt maladie ou son congé maternité !
L'épine dans le pied de Sarko, c'est qu'en France, les recettes libérales n'ont pas le vent en poupe. Le gouvernement dérégule, mais à marche forcée. En trouvant des alibis qui font passer la pilule, par exemple, celui de "gagner plus". Aucune des réformes qui touchent aux acquis sociaux n'est réellement populaire. Le travail du dimanche ne fait pas exception. Un sondage Via Voice pour Libération confirme une majorité d'opposition (55%) à la proposition de loi visant à faciliter le travail du dimanche. Mieux, 85% des sondés considèrent que le dimanche "doit rester un jour de repos pour le plus grand nombre" et pour 86%, il est "un jour fondamentalement pour la vie de famille, sportive, culturelle ou spirituelle".
Quant aux arguments économiques, aucun ne semble convaincant. Près de 60% des Français considèrent que travailler le dimanche ne permettrait ni d'augmenter le pouvoir d'achat des salariés concernés ni de "soutenir l'activité économique". Dans ce contexte, ils n'ont que faire de la "liberté" qui leur serait octroyée de pouvoir travailler le dimanche. Ils n'y aspirent pas. L'évolution de ces dernières années apprend à devenir méfiant. Une étude du ministère du Travail, publiée fin mai, révèle que 63% des salariés travaillent déjà avec des horaires atypiques, la nuit, le week-end, les jours fériés, etc. 60% d'entre eux sont exposés à des pénibilités physiques. Ces horaires décalés touchent principalement  les salariés peu qualifiés, plutôt jeunes et précaires, mal payés. Voilà pourquoi, une fois de plus, l'été arrive à point nommé. Le gouvernement programme une session parlementaire extraordinaire, et hop ! le tour est joué. la loi est discutée pendant que les Français profitent de leurs congés payés, temps libre qu'il a fallu arracher au patronat et dont l'épopée a commencé en 1936, avec le Front populaire. Un choix de société...


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